La prescription fiscale

Garant du civisme fiscal, les services de la Direction Générale des Finances Publiques disposent du pouvoir de contrôler les déclarations fiscales ainsi que les actes utilisés pour l’établissement des impôts, droits, taxes et redevances.

Dès lors, l’Administration fiscale peut vérifier la concordance des déclarations fiscales déposées par les contribuables avec les éléments dont elle dispose.

À ce titre, peuvent faire l’objet d’un contrôle fiscal les contribuables qu’ils soient des personnes physiques, ou des personnes morales.

Des lors, l’administration peut procéder à des rectifications lorsqu’elle constate des omissions dans l’assiette de l’impôt ainsi que des insuffisances, inexactitudes ou erreurs d’imposition.

Toutefois, ce contrôle fiscal s’imbrique dans un délai, à l’issue duquel aucune imposition, primitive ou supplémentaire, ne peut être établie.

On parle du « droit de reprise » ou du « délai de prescription ».

Ce droit de reprise de l’Administration fiscale est prévu aux articles L. 169 à L. 189 du LPF.

En matière de prescription fiscale, les délais diffèrent selon le type d’imposition et peuvent être interrompus par certains actes.

Délais de reprise: délais de principe et délais prorogés

En vertu de l’article L. 186 du LPF « Lorsqu’il n’est pas expressément prévu de délai de prescription plus court ou plus long, le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à l’expiration de la sixième année suivant celle du fait générateur de l’impôt ».

Par exemple, pour les revenus de l’année 2019 imposables cette même année, le délai de reprise expirera le 31 décembre 2025.

Néanmoins, ce délai de reprise de droit commun s’applique assez rarement en pratique et laisse le champ libre à plusieurs autres délais.

Impôts directs

En matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés (IR et IS), le délai de prescription de l’Administration fiscale expire en principe à la fin de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due (LPF, art. L. 169).

Toutefois, ce délai peut être porté jusqu’à la fin de la dixième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due en cas :

  • D’activité occulte du contribuable ou lorsque ce dernier bénéficie de revenus distribués par une personne morale exerçant une activité occulte (LPF, art. L. 169, al. 2);
  • D’établissement de procès pour flagrance fiscale(LPF, art. L. 169, al. 5) ;
  • De non-déclaration des avoirs détenus à l’étranger ou de revenus en provenance de l’étranger (LPF, art. 169, al. 4).

Ce délai de reprise peut également être prorogé de 3 ans en cas d’assistance administrative (LPF, art. L. 188 A) et de 2 ans si l’Administration fiscale a déposé plainte contre le contribuable pour fraude fiscale (LPF, art. L. 187).

Aussi, les erreurs sur la nature de l’impôt ou sur le lieu d’imposition peuvent être réparées jusqu’à la fin de l’année suivant celle de la décision qui a prononcé la décharge de l’imposition initiale (LPF, art. L. 171).

Pour les omissions ou insuffisances révélées lors d’une instance ou par une réclamation contentieuse, le délai de reprise court jusqu’à la fin de l’année suivant celle au cours de laquelle l’instance est close (LPF, art. L. 188 C).

En cas d’omission ou d’insuffisance révélée à la suite de l’ouverture d’une succession soit au titre de l’année du décès ou de l’une des quatre années antérieures, le délai de prescription expire à compter de la deuxième année suivant celle de la déclaration de succession ou à défaut, l’année du paiement par les héritiers des droits de mutation par décès (LPF, art. L. 172)

Concernant les droits d’enregistrement et l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), l’action en reprise des agents du fisc se prescrit le 31 décembre de la troisième année suivant celle de l’enregistrement ou celle au titre de laquelle l’IFI est du (LPF, art. L. 180).

En revanche, ce délai s’applique seulement si l’acte a été présenté à l’enregistrement ou si la déclaration d’IFI a été déposée. Dans le cas contraire, c’est le délai de prescription afférant à l’article L. 186 du LPF s’appliquera.

S’agissant des impôts locaux, le droit de reprise de l’Administration fiscale prend en principe fin le 31 décembre de l’année succédant celle au titre de laquelle l’impôt est dû (LPF, art. 173).

Toutefois, lorsque le contribuable a bénéficié d’une exonération, d’un abattement ou d’un dégrèvement, le délai de reprise est identique à celui appliqué en matière d’IR (LPF, art. L. 173, al. 2).

Pour la contribution foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée, le délai de reprise court jusqu’au 31 décembre de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due. D’ailleurs ce délai pourra également faire l’objet d’un allongement lorsque l’Administration fiscale a dressé un procès-verbal de flagrance fiscale ou en cas d’activité occulte. Le délai de reprise sera alors porté à 10 ans (LPF, art. L. 175, al. 2).

Ces textes concernent en réalité tous les impôts.

Taxe sur le chiffre d’affaires et contributions indirectes

En matière de Taxe sur le chiffre d’affaires (TVA), le délai de reprise de l’Administration fiscal, s’exerce en principe jusqu’à la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible (LPF, art. L. 176, al. 1).

Toutefois, lorsque l’exercice ne correspond pas à l’année civile, le délai de reprise court jusqu’à la fin de la troisième année suivant laquelle l’IS ou l’IR est dû (LPF, art. L. 176, al 3).

À l’égard des contributions indirectes, le délai de reprise s’applique jusqu’à la troisième année suivant celle au titre de laquelle l’imposition est due (LPF. art. 178).

 Pénalités fiscales

En vertu de l’article 188 du LPF, les amendes fiscales concernant l’assiette et le paiement des droits, taxes, redevances et autres impositions se prescrivent dans le même délai que les droits simples et majorations correspondants.

Aux termes du même article, les autres amendes se prescrivent à la fin de la quatrième année suivant celle au titre de laquelle l’infraction a été commise.

Enfin cet article prévoit également que pour le recouvrement des amendes et confiscations fiscales prononcées par la juridiction pénale, le droit de reprise s’inscrit dans les mêmes délais que les peines correctionnelles de droit commun.

Interruption de la prescription

De multiples événements, lorsqu’ils interviennent avant l’expiration d’un délai de reprise ont pour effet de mettre fin au délai de reprise et d’ouvrir à l’Administration fiscale un nouveau délai de prescription (et non de forclusion) aux fins de mettre en recouvrement les droits omis.

Ce nouveau délai, qui aura la même durée que l’initial, sera lui-même susceptible d’interruption.

Aux termes de l’article L. 189 du LPF, la prescription en matière fiscale peut se voir interrompre :

  • Par la notification d’une proposition de rectification ;
  • Par des déclarations ou notifications de procès-verbaux ;
  • Par tout acte comportant reconnaissance des redevables ;
  • Par tous autres actes interruptifs de droit commun ;
    Il s’agit de la citation en justice, le commandement et la saisie (C.civ, art. 2241 et 2244)
  • Pour les sanctions fiscales autres que celles visées à l’alinéa 3 de l’article 188 du LPF, par leur mention sur la proposition de rectification.

L’envoi d’un avis en recouvrement interrompt aussi la prescription. Le nouveau délai sera de 4 ans et pourra lui-même être interrompu (LPF. Art. 274)